- Cinéma, de David Lynch, 1978, Américain
- Pourquoi ça crame les oiseaux?
Film-poésie noire visuelle et sonore,
Eraserhead est une expérience lente, angoissante et insensée qui ne ménage pas
le spectateur non-averti. Il n’y a pas vraiment de violence mais une ambiance
lourde, de longues scènes en noir et blanc, une bande son plutôt bruitiste,
dans un univers qui présage des futurs films du réalisateur, bien que plus
onirique et minimaliste, avec aussi moins de moyens.
- L’histoire
Il est difficile de
parler d’histoire ici. Comme à l’habitude de David Lynch, ce n’est pas le sens
qui est le plus important, même si finalement l’évolution des événements est presque
plus facile à suivre dans les grandes lignes que dans un Lost Highway ou un
Mulholland Drive.
Un homme vit seul
dans un petit appartement près d’une usine. Il est amoureux d’une femme qui l’invite
à dîner chez ses parents, mais durant ce dîner il apprend que la femme est
enceinte, et qu’il doit l’épouser. Tout cela serait pour le mieux s’il n’y
avait pas ce bébé plus qu’étrange, face auquel on ne sait pas vraiment quoi
faire. Quand la mère part, trop agacée par les pleurs de ce petit monstrueux,
le « papa » se retrouve face à ses peurs et à ses espoirs qui se concrétisent
dans des scènes de rêves absurdes et fantastiques, dans lesquelles il rencontre
des femmes hors normes pleines de promesses et de menaces.
- Ce n'est que mon avis
Nous avons eu la
chance de voir Eraserhead au cinéma suite à sa restauration. Je n’avais jamais
vu ce film, le premier de David Lynch, et c’est vrai qu’il représente une bonne
introduction à son œuvre future. Assez simple et avec peu de personnages (c’est
presque entièrement un huit-clos entre l’homme et son bébé dans leur minuscule
appartement, à part la scène de repas au début et les échappées fantasmatiques
du personnage), il est très contemplatif, et on retrouve ces éléments
surréalistes et totalement gratuits qui créent l’ambiance à la fois drôle et
profondément dérangeante qui fait la pâte du réalisateur. Il y a : de
minuscules poulets rôtis qui s’agitent en crachant du sang, un père de famille
qui reste figé avec un large sourire alors que tout le monde autour pleure et s’agite,
une entreprise qui fait des gommes avec le cerveau d’une tête trouvée dans la
rue (d’où le titre du film), ou encore une femme aux joues de hamster qui
ecrase des fœtus en souriant et en chantant « in heaven everything is fine »
(chanson qui sera reprise par les pixies, voir la vidéo ci-dessous).
J’ai notamment beaucoup apprécié l’utilisation
de la marionnette – bébé, ayant un faible pour les marionnettes en général, qui
apportent souvent une magie inattendue. Dans ce film elle réussit à être
parfois attachante et souvent concrètement hideuse.
Les effets visuels comme sonores ont tendance
à maltraiter à dessein le spectateur : bruits lancinants ou stridents presque
industriels d’appareils électroménagers ou de la ville, transitions instantanées
entre des décors obscurs et des écrans d’un blanc aveuglant (surtout au cinéma,
ça fait mal aux yeux !).
A voir en prenant son temps, si on est un peu
maso, et si on apprécie déjà le réalisateur, le cinéma expérimental, l’expressionnisme
ou encore les radiateurs.