dimanche 17 septembre 2017

Ça

  • Cinéma, de Andy Muschietti, 2017, Américain


  • Pourquoi ça crame les oiseaux?

Un clown-démon qui habite les égouts joue avec les émotions les plus intimes de chaque enfant pour se nourrir de leur peur, et les enlever. C’est fait pour faire peur. C’est la grosse prod´ horreur de la rentrée, qui cible spécialement tous les enfants des 90´s que nous sommes, qui avons été marqués par le roman de Stephen King ou le téléfilm qui était passé sur M6 à l’époque, bien ancrés dans l’inconscient collectif. Car qui n’a jamais entendu cette voix dans ses cauchemars… Ils flottent tous en bas…    

  • L’histoire

Dans les années 80, dans la ville de Derry aux états unis, des enfants disparaissent mystérieusement. La « bande des ratés », 7 enfants qui se sont régulièrement les souffre-douleurs des gros bras de l’école, enquêtent sur le phénomène suite à la disparition du petit frère de l’un d’eux. Ils comprennent peu à peu qu’ils ont affaire à un phénomène paranormal dont les adultes ne peuvent pas avoir conscience. Leurs visions se multiplient : visions d’horreur d’un clown diabolique, qui se transforme à volonté pour les mettre face à leurs peurs les plus personnelles. Afin de sauver leurs frère et camarades, ils décident d’attaquer, malgré les problèmes d’ados, les peines de cœur et des parents pas toujours bien nets.  
   



  • Ce n'est que mon avis

Voilà un film taillé pour le succès commercial, et qui ne pouvait pas ne pas marcher. D’ailleurs, il a déjà battu tous les records d’entrées pour un film d’horreur aux États-Unis. Il joue sur plusieurs modes : celle des films d’horreur, qui deviennent de plus en plus grand public. Celle du revival années 80 : ceux qui ont suivi la série Stranger Things ont comme une impression de déjà-vu. Un jeune acteur (Finn Wolfhard) en commun, qui joue le même rôle avec les mêmes blagues en dessous de la ceinture, une bande de gosses sur des vélos qui mènent l’enquête, des parents à côté de la plaque, des caïds qui prennent une bonne leçon : c’est une recette classique. Et bien sûr, la reprise du roman de Stephen King, œuvre majeure de la pop-culture qui, avec la première série de téléfilms qui en ont été tirés, sont des référence pour toute une génération, ne pouvait que garantir un grand nombre d’entrées.      

Qu’en est-il du résultat ? Pour moi, l’ensemble est un divertissement agréable, parfois rigolo et visuellement travaillé. J’ai sursauté pas mal de fois (il faut le savoir si vous venez avec moi voir un film qui fait peur : je fais carrément des bonds sur ma chaises). Il y a un peu de violence et de sang mais pas trop, et un des côtés les plus noirs se situe peut-être dans les rapports avec les parents, parfois bien timbrés, voire violents. Dommage que les histoires personnelles de chaque enfant ne soient pas plus développées.





Du coup, on ne s’ennuie pas malgré les 2h15 du film, les apparitions fantasmagoriques sont efficaces, mais on n’est un peu déçu par le manque d’originalité de l’ensemble. J’ai lu quelque part que le clown Ça de Stephen King était un symbole du pédophile, qui se déguise en un personnage sympathique pour attirer les enfants à lui et se transformer en ce qu’ils craignent le plus. Cet aspect est plutôt simplifié, et le démon pourrait être n’importe quel fantôme de film, puisque l’aspect psychologique n’est que peu approfondi. Dommage, parce que les acteurs, enfants comme clown, ont un bon potentiel et sont souvent touchants, mais les visions ne viennent pas avec assez de subtilité et la tension ne s’installe jamais complètement.

Je tiens à saluer les mises en scènes du Festival Européen de Strasbourg : "Ça" y était le film d'ouverture en avant première, et on avait de jolis clown et autres personnages malfaisants qui erraient dans la salle... Sans parler des spectateurs déguisés! 




dimanche 10 septembre 2017

Les proies v/s The young lady


  • Cinéma, de Sofia Coppola/William Oldroy, 2017, Américain/Britannique




  • Pourquoi ça crame les oiseaux?

Ne laissez pas les femmes seules dans de grandes maisons à la campagne, surtout à des époques où il n'y a pas encore Internet, après elles font n'importe quoi et ça finit mal.

  • Pourquoi un Versus ?

Fin août est sorti le dernier film de Sofia Coppola : Les Proies.
Cette bande de nanas bien corsetées dans leurs robes d'époque, qui semblent seules au monde et cachent leurs émotions sous le vernis bien-pensant de leur éducation religieuse, ça laisse une petite impression de déjà-vu. Et même d'un film récent... The Young Lady, premier film de William Oldroyd sorti en avril dernier, a le même gout de classique en costume méchamment détourné, d'esprit féminin vengeur, de huit-clos psychologiquement tendu, de photographie léchée et de mâles mis à mal. Alors, grosses stars US ou newcomers britanniques?





  • Les histoires

Dans Les proies, pendant la guerre de Sécession, un pensionnat pour jeunes filles du Sud reste ouvert, dans lequel ne vivent plus qu'une poignée de femmes, enfant et adolescentes. Un soldat est retrouvé blessé dans une forêt non-loin de là : même s'il est du camp adverse, il est chrétien de lui porter secours. Alors qu'elles le soignent sagement, désirs et convoitises se développent. Un homme, six femmes, beaucoup de possibilités.

Dans The Young Lady, situé en Angleterre au XIXème siècle, il n'y a qu'une femme : Katherine, mariée à un vieux Lord plutôt méchant. Laissée seule une longue période par son mari, elle tombe amoureuse d'un des jeunes travailleurs de la demeure, et trouve la détermination nécessaire à la recherche de sa liberté, quelqu'en soit le prix.


  • Ce n'est que mon avis

Dans un film comme dans l'autre, la mise en scène est puissamment esthétique. On y admire les reflets de la lumière naturelle sur la peau lisse des femmes, et dans leurs épais jupons. La nature aux alentours est vaste et mystérieuse, pleine de promesses, et les grandes demeures sont sobres et imposantes.

 


Et partout, on se méfie de l'eau qui dort : la sérénité affichée des décors et des personnages, leur constante élégance, ainsi que la chasteté religieuse qui a cours à cette époque cachent des désirs et des pulsions intérieures sauvages. Dans les têtes, la frustration crée des manigances et des manipulations, plus ou moins conscientes, qui vont avoir pour cible les personnages hommes… Ces derniers se trouvent bien peu avisés de se croire protégés et libres de jouir de leur place de sexe fort dominateur. Voilà qui est plutôt jouissif pour nous mesdames !

Cependant, Les Proies joue plus sur la retenue. La pureté des jeunes filles en robe blanche, poussée jusqu'à la caricature, rappelle les sœurs de Virgin Suicide. Leurs actes ne sont pas immoraux : le soldat dont elles s'occupent est toujours bien traité, et on sent de la sincérité dans leurs rapports, jusqu'à ce que la situation se dégrade, apparemment plus par malchance que par calcul. Cette subtilité fait que l'on ne sait jamais où se trouve la limite entre décisions rationnelles, accidents malencontreux, méchanceté inconsciente et vengeance froide.


C'est ce flou qui fait l'intérêt de ce film face à The Young Lady : dans ce dernier, l'héroïne est dès le début du film prête à agir pour accéder à ce qu'elle désir. Cette brune ténébreuse, contrairement aux blondes de Mme Coppola, ne s'embête pas avec la compassion et étonne par sa fougue et son intelligence morbide. La mise en scène est aussi plus poussée : décor carrément minimaliste, absence de musique, le tout est plutôt glacial. 

Par contre, dans les deux cas j'ai eu un peu l'impression d'être trompée par la com' et les critiques : ce sont des films sombres certes, mais les classer dans "Thriller/horreur", c'est un peu trop. Ils ne sont pas à montrer à des enfants, mais on a pas spécialement peur. On est pas subjugué par le suspense, et c'est plutôt une tension qui se crée lentement et se termine par une violence que l'on ne voit pas directement, même si dans The Young Lady elle est clairement plus présente.




  • Conclusion

Malgré toute l'admiration que nous portons à Sofia Coppola et le talent de ses actrices, et même si nous avons trouvé beaucoup de points communs aux deux films, mon mec et moi avons clairement préféré The Young Lady : plus dark, il va plus loin, et apporte plus de surprises et de rebondissements : une découverte intéressante.