lundi 7 novembre 2016

Otto Dix – Le Retable d’Issenheim

  • Exposition, Peinture et dessin, d’Otto Dix et autres artistes, du 8 octobre 2016 au 30 janvier 2017 à Colmar


  • Pourquoi ça crame les oiseaux?

Ce peintre allemand ((2 décembre 1891 – 25 juillet 1969) est surtout connu pour ses dessins et peintures torturés sur son vécu de la 1ère guerre mondiale. Il est également réputé pour ses portraits sarcastiques et peu flatteurs dans le cadre du mouvement de la nouvelle objectivité. (Son tableau le plus connu en France étant son Portrait de la journaliste Sylvia von Harden, ci-dessous, peint en 1921 et racheté par le centre Pompidou en 1961).





Il dit sur la guerre : "C'est que la guerre est quelque chose de bestial : la faim, les poux, la boue, tous ces bruits déments. C'est que c'est tout autre chose. Tenez, avant mes premiers tableaux, j'ai eu l'impression que tout un aspect de la réalité n'avait pas encore été peint : l'aspect hideux. La guerre, c'était une chose horrible, et pourtant sublime. Il me fallait y être à tous prix. Il faut avoir vu l'homme dans cet état déchaîné pour le connaître un peu."

  • Ce dont il s’agit

Le musée Unterlinden de Colmar consacre une grande exposition à cet artiste allemand, en prenant pour fil conducteur ses thèmes, techniques et inspirations en lien avec un grand triptyque peint de 1512 à 1516 par le peintre Matthias Grünewald : Le retable d’Issenheim.

Pourquoi cette exposition ?
-          Otto Dix est assez peu représenté dans des expositions en France
-          Il a été prisonnier à Colmar, et a peint pendant cette période des œuvres différentes du reste de sa carrière, utilisant plus volontiers des thèmes et techniques classiques (comme les paysages et la religion)
-          Le retable d’Issenheim est aujourd’hui exposé en permanence au musée, et il vrai qu’à la vue des œuvres du peintre allemand exposées, et après la visite guidée de l’exposition, on ressent particulièrement le lien entre cette œuvre et celle d’Otto Dix : formes et techniques utilisées dans certaines œuvres, puissance et violence des représentations, thèmes religieux.

Sont exposées des œuvres de différentes époques : dessins de guerre, portraits (dont celui de Beaubourg), œuvres burlesques et ridicules classées comme « art dégénéré » par les nazis, paysages déchirés. On trouve aussi dans la deuxième moitié des peintures à thème religieux, mélangeant classicisme et un symbolisme fataliste, moderne, étonnant : comme ce portrait de la madone sous les traits de son amante mariée ainsi que la représentation de Job en soldat (si vous ne connaissez pas l’histoire de Job, je vous conseille c’est assez parlant sur la religion), ou sa propre identification à Saint Christophe (qui plie sous le poids de Jésus, donc du monde…).

  • Ce n'est que mon avis

Venus en week-end en amoureux à Strasbourg, c’est par hasard que nous sommes tombés sur l’annonce de l’exposition sur Otto Dix, que mon cher et tendre et moi-même appréciions déjà pour ses dessins macabres sur la guerre et ses peintures de personnages caricaturaux et ridicules. J’en avais notamment vu lors d’une exposition sur le mouvement Dada, auquel il a participé.


(Danse des morts)

Il y a des œuvres de ce type au musée de Colmar, mais j’ai été aussi surprise par les aspects que je ne connaissais pas. Il a utilisé beaucoup de techniques différentes, de dessin, de peinture (cubisme, expressionisme… jusqu’à des styles copiés de maîtres anciens). Voir ces œuvres en vrai est impressionnant et donne une sensation forte de la violence et du désespoir qu’elles sont faites pour transmettre.

J’ai aussi été assez étonnée par le virement religieux de son œuvre : comment une vision de l’humanité aussi désespérée et noire peut-elle être le fruit d’un esprit croyant ? Les différents articles que j’ai parcourus lient plutôt philosophiquement le peintre à Nietzsche. Sa manière de moquer le monde et les hommes (l’œuvre divine !) ne parait pas très digne d’un bon chrétien. Alors, d’où vient cet attrait pour les sujets christiques et de saints vers la fin de sa carrière? Est-ce lié à l’époque, qui contrairement à aujourd’hui laissait peu de place à la laïcité ?  Est-ce la vieillesse et la peur de la mort qui ont poussé le peintre à croire en un au-delà ? Est-ce qu’il a voulu se refaire une respectabilité dans le monde de la peinture de l’époque en reprenant des thèmes classiques (en y injectant discrètement ses ressentis)? Est-ce que la grandeur du sacrifice et de la souffrance en tant qu´épreuve divine infligée aux hommes pour tester leur foi est seule capable de rassurer l’esprit face à la cruauté du souvenir de la guerre ?


(Saint Christophe)

Malheureusement peu de sources dans les quelques-unes que j’ai pu trouver sur internet ne répond à cette question (ni ne la pose !). Mais elle a tout de même été pour moi un des intérêts de cette visite, en plus des visions artistiques et historiques.

Par contre, et comme on trouve tout sur internet, je vais conclure cet articles avec une vidéo qui n’a pas grand-chose à voir mais qui m’a bien amusée, alors je vous la montre : un groupe de gothique russe a décidé de s’appeler Otto Dix ! Je ne sais pas si l’artiste apprécierait, mais c’est une curiosité !



   

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire